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Le 6ème rapport de synthèse du GIEC est publié. Que nous dit-il ?

Le 6ème rapport de synthèse du GIEC, publié le 20 mars 2023, après avoir été âprement  négocié entre les scientifiques et les Etats , a été adopté par les 195 membres du GIEC. Il clôture un cycle d’évaluation de 8 ans auquel ont participé des milliers de scientifiques du monde entier. Il est particulièrement important car il constituera, pour chaque Etat, la base scientifique du premier bilan de ses réalisations depuis les engagements pris en 2015 dans le cadre de l’Accord de Paris. Point crucial à l’agenda de la prochaine COP28 qui se tiendra à Dubaï du 30 novembre au 12 décembre 2023.

Quelles sont les principales constatations et conclusions de ce rapport ?

Depuis le début de la révolution industrielle (1850-1900), la température à la surface du globe a augmenté de 1,1°. Cette augmentation est due aux émissions de gaz à effet de serre (GES) produites par les activités humaines.

Le changement climatique se produit à un rythme et une ampleur sans précédent, entraînant des événements extrêmes de plus en plus fréquents et violents. Il menace toujours davantage la sécurité alimentaire de millions de personnes, rend de plus en plus problématique l’accès à l’eau et sa gestion, et a des conséquences dramatiques sur la biodiversité, l’acidification des océans, l’élévation du niveau de la mer…

En dépit d’un ralentissement durant la période du Covid, la concentration mondiale de GES a continué à augmenter au cours de la dernière décennie, malgré les engagements pris. Seuls 18 pays ont réussi à réduire leurs émissions pendant plus de 10 ans.

Le rapport met également en évidence la répartition très inégalitaire de ces émissions, dont les conséquences frappent principalement des populations qui, historiquement, n’ont pas ou peu produit de GES. Actuellement 50% des plus pauvres sont responsables de 13 à 15% des émissions de GES, contre 35 à 45 % pour les 10% les plus riches.

Le GIEC détaille pour la première fois les aspects régionaux du changement climatique : il met en évidence les variations substantielles de la vulnérabilité des écosystèmes selon les régions du globe : 3 milliards d’individus, vivant dans des régions particulièrement vulnérables telles que l’Afrique au Sud du Sahara, l’Asie du Sud, les petites îles, ou l’Arctique, seraient menacés.

Le terme “justice climatique” est donc devenu le leitmotiv des Nations Unies et des militants du climat. Il faut se rappeler que le fonds pour « les pertes et préjudices” a été un des grands enjeux de la COP 27 et le sera sans aucun doute également à la COP 28.

Certaines conséquences du réchauffement sont déjà irréversibles, telles l’augmentation du niveau de la mer de 0,20 m et la fonte des glaciers. Le rapport rappelle que le réchauffement climatique n’est pas linéaire. Sommes-nous au bord de points de ruptures en Arctique, en Amazonie ? De plus, les risques liés au changement climatique seront de plus en plus complexes et difficiles à gérer.

A politique inchangée, les experts du GIEC estiment que la température augmentera de plus de 3,2° à la fin du siècle : la survie de l’humanité sera en jeu, la  terre étant devenue invivable dans de nombreuses régions et pour beaucoup d’espèces.

Certes des progrès ont été enregistrés, tant dans le domaine de l’adaptation que dans l’atténuation (càd les mesures visant à diminuer les émissions de GES). Mais ces progrès sont largement insuffisants, de même que les financements. Le soutien aux énergies fossiles, principales sources de la production des GES, est, encore aujourd’hui, plus important que les financements dédiés à la lutte contre le changement climatique. Il faut de toute urgence déployer massivement les énergies basses carbone et accélérer la reforestation.


Secteur par secteur le rapport détaille les solutions préconisées. Il souligne que nous avons le savoir-faire, les outils, les finances  pour surmonter les défis posés  par le changement climatique en cours. Il souligne également que la réduction de la demande de biens de consommation et la sobriété sont des éléments indispensables pour espérer limiter l’augmentation de la température à un niveau compatible avec la vie sur terre.

Le temps est compté. L’objectif de maintenir l’augmentation de la température en dessous de 1,5° est, pour de nombreux scientifiques, déjà dépassé. Il faut  entendre et répondre à  l’appel constant du Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui ne cesse de marteler que tout doit être  mis en œuvre  pour affronter toutes affaires cessantes le plus grand défi auquel est confronté l’humanité.

En ce qui concerne la Belgique, les émissions de GES, après la pause due au Covid, sont reparties à la hausse.Ce qui signifie que la Belgique ne respecte  pas la trajectoire définie dans le cadre du green deal européen.

Par ailleurs, le problème de la gouvernance climatique reste entier. Notre pays ne dispose toujours pas d’une loi climat opposable à toutes les entités et la question du burden -sharing (répartition des émissions de GES, contribution au financement climatique international,) entre les Régions n’est toujours pas résolue. Malgré les critiques d’organisations internationales comme l’OCDE et le FMI, la Belgique n’a toujours pas trouvé un accord politique lui permettant de disposer d’un cadre cohérent  pour encadrer  la gestion de sa politique du climat, dont les compétences sont réparties entre toutes les entités fédérées et le gouvernement fédéral. Heureusement les Régions ont bien avancé et disposent aujourd’hui’ d’un plan énergie-climat. Mais ces plans ne résolvent pas la question de la coordination et de la cohérence globale au niveau belge.

 ✒️ Martine Van Dooren, administratrice APNU

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