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Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires : quel en est le résultat ?

Dans notre bulletin de juillet-août 2021, nous vous avions présenté les grandes lignes de cette importante initiative du Secrétaire général de convoquer un Sommet d’un nouveau genre, destiné à activer la transition vers des systèmes alimentaires durables comme moyen d’atteindre les Objectifs de développement durable (ODD).

Après 18 mois de préparation intensive à travers un processus qui se voulait le plus inclusif et participatif possible et un pré-sommet qui a eu lieu à Rome en juillet, et alors que des voix s’élevaient pour en critiquer certains aspects, le Sommet a bien eu lieu les 23 et 24 septembre en marge de l’Assemblée générale.

Quel en est le résultat et quelle sera la suite qui y sera donnée ?

Il faut le dire, le Sommet lui-même fut plutôt décevant. Il a consisté en une longue suite de déclarations, essentiellement en ligne, des gouvernements et des principales parties prenantes qui toutes allaient dans le même sens : oui, la transition vers des systèmes alimentaires durables est d’une importance cruciale pour assurer une alimentation saine et suffisante pour tous et des revenus équitables pour tous les intervenants, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, en protégeant la biodiversité et en régénérant les sols ; oui, l’action est urgente en impliquant toutes les composantes de la société, et en particulier les jeunes, les femmes et les peuples autochtones ; oui, il faut plus de moyens financiers, encourager l’innovation tout en respectant l’égalité des sexes et les droits humains. Mais ces déclarations contenaient très peu d’engagements concrets et aucun programme ou déclaration commune n’a été adopté à l’issue du Sommet.

Alors, la montagne aurait-elle accouché d’une souris ? C’est un peu ce qu’on peut craindre en lisant la Déclaration d’action du Secrétaire général, un document de six pages qui constitue en fait le résumé des principaux résultats du Sommet. Ce document rappelle le processus de préparation du Sommet, la nécessité de transformer les systèmes alimentaires et les grandes lignes des 5 domaines d’action exposés dans le précédent bulletin tout en faisant le lien avec les ODD.

Le plus important est sans doute la section concernant le suivi du Sommet : aucune nouvelle institution ne sera créée, ce sont les trois agences basées à Rome, la FAO, le PAM et le FIDA, qui dirigeront conjointement un centre de coordination dont les tâches sont définies dans le document. Au niveau intergouvernemental, le suivi serait assuré par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), bien que son rôle ne soit pas défini avec précision. Enfin, le Secrétariat préparera un rapport annuel jusqu’en 2030 et le Secrétaire général convoquera une réunion mondiale de bilan tous les deux ans.

Toutefois, le processus de préparation du Sommet aura mobilisé énormément d’énergies et de parties prenantes au travers de centaines de concertations nationales, régionales ou même mondiales. Ce processus aura mis en lumière la nécessité absolue  d’une approche systémique et inclusive pour atteindre les ODD, et c’est déjà un beau résultat. Au niveau national, les concertations ont conduit à la formulation de « Voies nationales pour la transformation des systèmes alimentaires », dont 93 avaient été soumises au Secrétariat du Sommet avant le 22 septembre 2021.

Tout aussi important, les différentes concertations ont permis la mobilisation de nombreuses coalitions pour agir en faveur de groupes de solutions dans les cinq domaines d’action. C’est ici qu’on trouvera les véritables engagements concrets et les actions qui feront vraiment la différence. On notera  par exemple la coalition « élevage durable », qui préconise d’aligner la production et la consommation sur les limites environnementales, ce qui implique une réduction de la production et un meilleur équilibrage de la consommation, ou encore la coalition « agroécologie et agriculture régénérative », qui vise clairement à réduire les monocultures intensives et l’utilisation des intrants de synthèse.

C’est le cas aussi de la coalition « La nourriture n’est jamais gaspillée », qui s’engage à réduire les gaspillages de moitié d’ici 2030. Les informations sur tous ces résultats sont présentées de manière très complète dans le « Compendium du Sommet ».  Reste à savoir si ces différentes coalitions et voies nationales auront les moyens d’atteindre leurs objectifs.

Enfin, le secrétariat du Sommet a enregistré toute une série d’engagements divers qui s’inscrivent dans les différents domaines d’action et qui émanent de pays, d’institutions ou encore de collectivités. Ces engagements au nombre de 231 sont  rassemblés dans un registre disponible ici.

Et la Belgique ?

Comme indiqué dans le Bulletin de juillet-août 2021, c’est Hilde Crevits, Vice-Ministre-Présidente du Gouvernement flamand, qui a été désignée comme Coordinatrice du dialogue national pour le Sommet sur les systèmes alimentaires. Cette nomination ayant eu lieu tardivement à notre connaissance, le processus de concertation n’a pas encore été lancé.

Il faut dire que le sujet est en grande partie couvert par la réforme de la politique agricole commune de l’Union Européenne et par les programmes que cette dernière a récemment lancés : « Green Deal » et « From Farm to Fork ». La Ministre est toutefois intervenue en ligne au Sommet le 24 septembre. Sa déclaration en anglais est disponible ici.

Elle s’est en particulier engagée à lancer un processus de formulation d’une stratégie nationale pour la transformation des systèmes alimentaires, qui sera présentée à un « sommet » national à la fin de l’année prochaine. Elle a également indiqué que la Belgique soutenait le rôle du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) et de son groupe d’experts de haut niveau pour assurer le suivi du Sommet sur les systèmes alimentaires.

André Hupin – Secrétaire général de l’Association pour les Nations Unies (APNU Belgique)

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