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Une base de données globale sur les victimes et auteurs de traite d’êtres humains : Vers une approche scientifique pour prévenir et lutter contre la traite d’êtres humains.

Le 8 décembre 2022, l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), dans le cadre du projet « Counter Trafficking Data Collaborative – data hub (CTDC)», publie le « Global Victim-Perpetrator Synthetic Dataset », une base donnée mettant en relation les profils de victimes/ survivants de traite d’êtres humains ainsi que les auteurs de ces faits. Cette base de données couvre 17 000 cas de victimes/ survivants ainsi que les profils de 37 000 auteurs et facilitateurs, à travers 123 pays/ territoires, de 2005 à 2022 (voir l’article de présentation). Ces données représentent des informations clés sur les conditions dans lesquelles les crimes de traite d’êtres humains se déroulent et détaillent les types de relations entre victimes/ survivants et auteurs. Cette base de données contient également des informations sur les profils des victimes telles que le genre/ sexe, l’âge, la région d’exploitation, la région de la nationalité, le type d’exploitation ; ainsi que des informations sur les profils des auteurs telles que le genre/ sexe, l’âge et le rôle joué (recrutement, exploitant, courtier pour les transactions, restriction de liberté de mouvements/ kidnapping, séquestration) dans l’entreprise criminelle. (le document descriptif de la base de données disponible ici, la base de données et ses documents connexes sont disponibles ici).

L’observation, la mesure et l’analyse de la traite d’êtres humains sont des tâches complexes. Il y a un besoin important d’obtenir plus d’informations fiables sur la prévalence et les contextes ainsi que l’échelle auxquels se déroule la traite d’êtres humains. A ce jour, les forces de l’ordre disposent de quelques estimations, parfois peu fiables, et de données qui ne sont pas collectées de manière systématique et harmonisée à travers les acteurs (gouvernements, ONG, agences ONU/ humanitaires, IGO) travaillant dans l’accueil des victimes/ survivants et dans la lutte contre la traite d’êtres humains. Ce manque de données est également imputé à la nature illégale et donc cachée de la traite d’êtres humains, ainsi qu’à la difficulté d’obtenir des témoignages de victimes/ survivants. Ces manquements dans la collection des données donnent lieu à des divergences dans l’opérationnalisation (la définition d’indicateurs) et l’identification de cas de traite d’êtres humains et empêchent une compréhension holistique, nuancée et détaillée de la complexité et de la diversité des types d’exploitations ainsi que des processus de traite d’êtres humains (pour plus de précisions sur les points évoqués dans ce paragraphe, voir Schroeder et al., 2003; Laczko & Gramegna, 2003). Globalement, il y a 3 besoins en termes de données :

  • Une harmonisation des définitions et des indicateurs utilisés pour identifier les cas de traite d’êtres humains ;
  • Une harmonisation des techniques de collections de données et des informations collectées ;
  • Le partage de données entre entités/ institutions.

A cet effet, le CTDC apporte plusieurs solutions intéressantes. Tout d’abord, le projet met à disposition une série de base de données (3 au total, réalisées avec différentes techniques de préservation de l’anonymat et couvrant différentes périodes dans le temps) recensant à l’échelle globale 156 000 cas de traite d’êtres humains répertoriés par l’OIM. Ces bases de données permettent d’effectuer des observations descriptives importantes à la compréhension de l’envergure de la traite d’êtres humains, comme par exemple l’augmentation ou la diminution de cas répertoriés en fonction du temps et du lieu. La mise à disposition publique de telles données est possible grâce à une collaboration entre Microsoft-Research et l’OIM. Les données, à l’origine, proviennent du système de gestions de cas de l’OIM (un système nommé MiMOSA[1]). Sur base des données originales, des données synthétiques sont créées (le processus est décrit ici et vulgarisé dans cette présentation), constituant ainsi une nouvelle base de données synthétique préservant les propriétés statistiques de la base de données originale.

Le projet favorise également le partage de données entre entités par la mise à disposition publique, en open source, d’une application web permettant l’anonymisation de données et la création de base de données synthétiques. Ces ressources sont publiquement disponibles pour des organisations et entités tierces via la plateforme GitHub. D’autres ressources dédiées à la compréhension, la fiabilité et l’utilisation du procédé sont également disponibles dans une présentation PowerPoint, un ‘toolkit’ et une bibliographie hébergée par l’OIT.

Monica Goracci, Directrice du Département Migration à l’OIM, explique que ces avancées ouvrent la voie vers l’utilisation d’une approche scientifique dans le développement de politiques publiques et de solutions à la traite d’êtres humains.


[1] Ces données sont collectées par des travailleurs sociaux (‘case workers’) lors de l’enregistrement de nouveaux cas (victimes/ survivants de trafic) au niveau individuel ou au niveau du foyer. La capacité à collecter ces données est restreinte par l’implémentation géographique de l’OIM ainsi que par la discrétion exercée par l’OIM dans la gestion de dossiers sensibles.

Noé D. Petitjean, APNU Jeunes

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